Toujours dans le cadre de l’apprentissage à l’étude de texte, étude de texte qui sera le sujet du prochain devoir surveillé, nous proposons ci-dessous un exemple sur le texte d’Aristote, Ethique à Nicomaque.
Revoir au besoin 1) le texte et le cheminement proposé et 2) l’étude sur les notions principale du texte
Une remarque pour commencer : en aucun cas le devoir ne doit faire apparaître des titres. Ici, ils apparaissent comme repère.
Introduction
Nous préférons le plaisir au déplaisir. Et cela est bien normal. Pourtant Aristote semble nous dire dans cet extrait de l’Ethique à Nicomaque que le plaisir n’est pas le bien et que tout plaisir n’est pas désirable. Alors, le plaisir nous comble-t-il vraiment ? N’y a-t-il pas derrière lui, si ce n’est parfois une certaine amertume au moins toujours un sentiment d’insuffisance ? N’y a-t-il pas par exemple des plaisirs honteux, des plaisirs coupables ?
Il semble qu’il manque au plaisir une dimension, celle que nous accordons sans hésiter au bien. Celui-ci n’est-il pas plus avantageux que le simple plaisir ? Ne nous comble-t-il pas davantage ? Dans ce texte, Aristote opère une distinction conceptuelle importante : le bien diffère du plaisir. L’auteur analyse les désirs humains et montre que tous ne visent pas leur satisfaction dans le plaisir mais qu’ils peuvent aussi se porter vers des biens distincts du plaisir. Ainsi, on peut désirer non pas pour éprouver du plaisir mais pour d’autres motivations. Tout le problème est alors de savoir quelle place on doit accorder au plaisir. Doit-on y renoncer ? Doit-on l’exclure de notre recherche du bonheur ?
Dans ce texte, Aristote commence par différencier le plaisir et le bien pour ensuite montrer qu’il est possible, d’une part, de ne pas rechercher le plaisir, et, d’autre part, de rechercher autre chose que le plaisir relevant du bien. Cet extrait qui se termine par la nécessité de distinguer le plaisir du bien n’a finalement d’autre objectif que de démontrer que le bonheur que l’être humain doit désirer est à comprendre non comme plaisir mais comme bien moral. Et ce que nous allons étudier.
Développement
Partie 1
Tout d’abord Aristote prend un exemple, celui de la différence entre l’ami et le flatteur. Son but est de suggérer qu’il existe une différence entre le bien et le plaisir. Aristote commence par dire que « le fait que l’ami est autre que le flatteur semble montrer clairement que le plaisir n’est pas un bien ». Alors que l’ami recherche notre bien, il est bienveillant à notre égard, il est attentif, le flatteur, au contraire a pour but, par sa flatterie de nous procurer du plaisir. Précisons cette distinction entre l’ami et le flatteur parallèlement à celle du bien et du plaisir.
Pourquoi l’ami recherche-t-il notre compagnie, si ce n’est pour la raison noble tenant à son amitié pour nous. L’ami nous veut du bien, il ne nous veut que du bien. Son amitié pour nous ne provient pas de motivation tenant d’intérêts égoïstes, superficiels. L’amitié a pour finalité l’amitié elle-même, c’est-à-dire le bien pour l’autre, l’ami. Autrement dit, son amitié est bienveillante et cette bienveillance est désintéressée. En effet, derrière nulle arrière pensée, nulle utilisation de notre personne comme moyen pour une quelconque utilisation ou pour son plaisir. Cette bienveillance de l’ami à notre égard se caractérise par la recherche de ce qui est essentiel et profitable à long terme. En cela, l’ami peut être exigeant à notre égard.
Quant au flatteur, et son attitude apparaît diamétralement opposée à celui de l’ami, a pour but de nous procurer des plaisirs. Sa démarche est en cela bien plus superficielle. Nous savons que flatter c’est complimenter, et il vrai que les compliments que le flatteur peut nous adresser peuvent nous être agréables. La flatterie caressent dans le sens du poil, elle nous adresse des éloges, et cela nous plaît bien, même si elle n’a pas le caractère de la vérité, de la sincérité. Ce que touche la flatterie par ses compliments et ses éloges ne sont que des aspects plutôt peu essentiels de notre être. Par exemple, le flatteur saura nous complimenter sur notre apparence, comme si l’apparence était ce qu’il y a de plus fondamental dans la vie.
D’autre part, la flatterie se caractérise par un deuxième point : l’intérêt. Le flatteur flatte car il cherche quelque chose. Précédemment, nous disions que le flatteur a pour but de nous procurer des plaisirs, nous pouvons désormais ajouter qu’il agit pour son propre plaisir. Alors que l’ami, désintéressé, ne vise que l’autre ami dans la relation en voulant son bien, au contraire, le flatteur, intéressé, ne cherche qu’un gain pour lui. Flatter, faire des courbettes à son supérieur pour s’en faire bien voir. On peut aisément douter de la sincérité de la flatterie, souvent fausse ou hypocrite. Cependant, et cela est digne de remarque, quand bien même ces flatteries nous étant adressées seraient perçues de nous comme peu sincères, elle ne cesseraient pas d’exercer un pouvoir sur nous, une attraction plus forte que notre lucidité. La séduction opérée par le flatteur fonctionne grâce finalement à notre complicité. Et en cela, la flatterie peut s’avérer dangereuse en ce qu’elle peut être manipulatrice.
La célèbre fable de Jean de La Fontaine, « Le corbeau et le renard » est à cet égard particulièrement illustrative. Le renard, intéressé par le fromage tenu par le bec de Maître corbeau, par la ruse flatte ce dernier, qui, naïf, ne se sent plus de joie… et laisse tomber sa proie. La flatterie, on le voit est en fait moquerie, elle joue, elle se joue de l’autre. Quand le corbeau prend conscience que le renard s’est moqué de lui, il est trop tard, son plaisir disparaît. La flatterie laisse derrière elle, plus que la vexation, la déception et la désillusion. Et le renard de dire au corbeau confus par sa naïveté d’avoir été ainsi trompé de dire : « Mon bon Monsieur, apprenez que tout flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute ». On constate qu’elle est vice dans le sens où elle n’avait pour but que de nous abuser, de se servir de nous, de se jouer de nous.
Rien de cela dans l’amitié. Elle ne déçoit pas. Nulle désillusion, elle ne joue pas avec nous, elle ne se joue pas de nous. Pas de flatterie, ni de séduction et de mensonge ! Pas d’intérêt ni d’artifice ; pas d’hypocrisie mais sincérité ! On comprend bien pourquoi Aristote rappelle qu’on adresse généralement au flatteur « des reproches et à l’autre (l’ami) des éloges. » Autrement dit, on condamne le flatteur alors qu’on valorise l’ami. Aristote nous suggère que derrière le plaisir issu d’une flatterie se cachent bien des désagréments, des déplaisirs.
Partie 2
Mais qu’est-ce qui caractérise le plaisir et qu’est-ce qui le rend incomplet comparativement au bien ?
Le plaisir se caractérise par l’agréable, mais il est agréable seulement au moment où il est ressenti. Le caractère agréable du plaisir n’est pas durable, il est éphémère et peut même parfois, dans certains cas, se convertir en souffrance. Par exemple si fumer apparaît agréable au fumeur, le plaisir cesse rapidement d’où la rapidité du désir de fumer de naître à nouveau ; et quand survient la maladie et son lot de souffrance, conséquences de la tabagie, il ne sera plus temps de regretter ces petits plaisirs successifs des cigarettes grillées. Le plaisir peut donc être un piège. Il sait piéger tout comme le flatteur ou le séducteur sait piéger.
à suivre