La Grande Cité, Mahanagar, 1963, de Satyajit Ray
La situation de ce petit comptable est loin d’être facile. Modeste employé d’une banque de Calcutta, Subrata doit, avec son maigre salaire, faire vivre, à lui tout seul, trois générations d’une famille de six personnes. Arati, son épouse, qui comme la plupart des femmes indiennes, s’occupe de ses tâches domestiques, et leurs deux enfants, Bani, la fille, étudiante, Pintu, le petit garçon et ses parents, Priyagopal, son père, ancien professeur à la retraite qui devient aveugle et sa mère, Sarojini, qui fait ce qu’elle peut pour aider sa bru.
Les dettes s’accumulent et le grand-père Priyagopal doit se faire soigner les yeux. Un soir, après sa pénible journée de bureau, Subrata raconte que la femme d’un de ses amis a accepté de prendre un emploi, contrairement aux usages et à la tradition de la famille bengali. Arati lui propose alors d’en faire autant et de chercher du travail afin d’améliorer la situation devenu pénible. Résigné, malgré bien des hésitations, Subrata finit par accepter.
Arati trouve rapidement un emploi de représentante de commerce. Elle fait du porte-à-porte pour vendre des machines à tricoter. Mais Subrata son mari vit plutôt mal cette situation, tout comme les siens d’ailleurs.
Avec son premier salaire, Arati espère faire plaisir à ses proches en les comblant de cadeaux. Mais le petit Pintu se plaint de ne plus voir sa maman, Sarojini, la belle-mère d’Arati, se retrouve seule pour s’occuper du foyer et le grand-père préfère mendier une paire de lunettes auprès de l’un de ses anciens élèves, plutôt que d’accepter celle que lui offre sa belle-fille.
Devant cette réprobation, Subrata cherche une activité complémentaire afin que son épouse abandonne la sienne. Arati est sur le point de démissionner, mais son patron, Himangsu Mukherjee, lui offre une promotion avec augmentation de salaire : elle change d’avis. Sage décision, car son mari vient de perdre son poste, suite à la mise en faillite de sa banque.
De par sa situation professionnelle et au contact de sa meilleure amie et collègue, Edith Simmons, une jeune anglo-indienne, Arati change de personnalité, s’émancipe. Mais l’atmosphère familiale se dégrade et Priyagopal, de plus en plus malade, se plaint d’être délaissé. Edith Simmons est licenciée par Mukherjee, plus par racisme que pour faute grave. Devant cette injustice, Arati donne sa démission. Dans l’escalier de la société, Arati croise Subrata, qui espérait pendant un temps l’aide de Mukherjee. Même s’ils n’ont plus de travail, les deux époux se retrouvent.
Ce film de Satyajit Ray dresse ainsi le portrait d’une femme, qui en enfreignant les traditions, prend conscience de sa véritable personnalité. Dans l’extrait ci-dessous, on peut voir Arati se regarder dans un miroir, son salaire dans les mains, et mesurant tout le chemin qu’elle a parcouru et les barrières sociales et culturelles qu’elle a dû dépasser.
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