BAC PHILO 2016. Les sujets de Polynésie en séries Technologiques

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Sujet 1 :

Puis-je perdre ma liberté de penser ?

Sujet 2 :

Pour apprécier une oeuvre d’art, suffit-il qu’elle nous plaise ?

Sujet 3 :

« La science commence dès que le savoir, quel qu’il soit, est recherché pour lui-même. Sans doute, le savant sait bien que ses découvertes seront vraisemblablement susceptibles d’être utilisées. Il peut même se faire qu’il dirige de préférence ses recherches sur tel ou tel point parce qu’il pressent qu’elles seront ainsi plus profitables, qu’elles permettront de satisfaire à des besoins urgents. Mais en tant qu’il se livre à l’investigation scientifique, il se désintéresse des conséquences pratiques. Il dit ce qui est ; il constate ce que sont les choses, et il s’en tient là. Il ne se préoccupe pas de savoir si les vérités qu’il découvre seront agréables ou déconcertantes, s’il est bon que les rapports qu’il établit restent ce qu’ils sont, ou s’il vaudrait mieux qu’ils fussent autrement. Son rôle est d’exprimer le réel et non de le juger. »

DURKHEIM, Education et sociologie (1922)

Pour expliquer ce texte, vous répondrez aux questions suivantes, qui sont destinées principalement à guider votre rédaction. Elles ne sont pas indépendantes les unes des autres et demandent que le texte soit d’abord étudié dans son ensemble.

1. Dégager l’idée principale du texte et les étapes de sa construction.
2. Expliquer :
a) «le savant sait bien que ses découvertes seront vraisemblablement
susceptibles d’être utilisées »
b) « pressent qu’elles seront ainsi plus profitables »
c) « il se désintéresse des conséquences pratiques. »
3. Peut-on rechercher la vérité seulement pour elle-même ?

BAC PHILO 2016. Les sujets de philosophie de Polynésie pour la série S.

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Sujet 1

Pourquoi les oeuvres d’art nous séduisent-elles ?

Sujet 2

Puis-je me tromper sur mes droits ?

Sujet 3

Expliquer le texte suivant :
Le mouvement de notre corps fait suite au commandement de notre volonté. De cela, nous sommes à tout moment conscients. Mais le moyen par lequel ce résultat est obtenu, l’énergie qui accomplit une opération aussi extraordinaire, c’est de quoi nous sommes si loin d’être immédiatement conscients qu’il faut que cela échappe à jamais à nos recherches les plus diligentes(1).
Car, premièrement, y a-t-il dans toute la nature un principe plus mystérieux que l’union de l’âme et du corps, principe par lequel une substance qui est supposée spirituelle acquiert une telle influence sur une substance matérielle que la pensée la plus subtile est capable de mettre en branle la matière la plus grossière ? Si nous avions le pouvoir, par un voeu secret, de déplacer les montagnes ou de contrôler l’orbite des planètes, cet empire étendu ne serait pas plus extraordinaire ni plus incompréhensible. Mais si la conscience nous faisait apercevoir dans la volonté une énergie ou un pouvoir, nous devrions connaître ce pouvoir ; nous devrions connaître sa liaison avec l’effet ; nous devrions connaître l’union secrète de l’âme et du corps et la nature de ces deux substances, par où l’une est capable d’agir sur l’autre en tant d’exemples.
Deuxièmement, nous ne sommes pas capables de mouvoir tous les organes de notre corps avec une pareille autorité ; et l’expérience est la seule raison que nous puissions invoquer pour une différence aussi remarquable. Pourquoi la volonté a-telle une influence sur la langue et sur les doigts, et non sur le coeur ou sur le foie ? Cette question n’aurait rien d’embarrassant si nous avions dans le premier cas la conscience d’un pouvoir faisant défaut dans le second.

David HUME, Enquête sur l’entendement humain (1748)

(1) Diligentes : développées et perspicaces La connaissance


 

BAC 2016. Les sujets de philo d’Amérique du nord pour la Série ES

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Sujet 1

L’art peut-il être indifférent au beau ?

Sujet 2

Les hommes vivent-ils en société par intérêt ?

Sujet 3

« L’obligation n’est pas la nécessité. Quand j’abandonne une pierre à elle-même, elle tombe et ne peut pas faire autrement, et quand j’énonce cette loi générale, les corps sont attirés vers le centre de la terre, j’énonce une loi nécessaire en ce sens que les faits qu’elle embrasse ne sauraient en aucune manière s’y soustraire et cela tient à une raison fort simple. Les lois de la physique qui sont nécessaires ne sont guère que la constatation de ce qui se passe. Le physicien observe, expérimente et exprime par une formule générale le résultat de ses observations. Il est donc impossible que les faits se dérobent à la loi puisque la loi exprime les faits. Si un jour un phénomène ou un objet échappait à son influence, cela prouverait qu’elle est fausse, qu’elle n’est pas la vraie. Il faudrait en chercher une autre à laquelle obéissaient même les phénomènes nécessaires. Une loi nécessaire est donc une loi postérieure aux événements qu’elle régit. Elle en est l’expression, la formule et les événements ne peuvent s’y soustraire par la raison très simple qu’elle se borne à les traduire. Il n’en est pas ainsi pour la loi morale. Les lois de la morale sont antérieures aux événements qu’elles prétendent régir et c’est par là qu’elles se distinguent des lois physiques. Cette loi, il ne faut pas voler, n’est pas l’expression abrégée, l’expression générale de ce qui se passe. Il y a des vols et des voleurs ; elle n’indique pas ce qui est mais ce qui devrait être. Ce n’est point un abrégé de la réalité, c’est un idéal qui précède la réalité et auquel la réalité devrait se conformer. De là vient qu’à l’opposé des lois physiques, ces lois de la morale admettent des exceptions. On peut se soustraire à leur influence ; on ne le devrait pas, mais on le pourrait. Et c’est en quoi l’obligation se distingue de la nécessité. »

Henri BERGSON, Leçons de Clermont-Ferrand, 1883

Révisions BAC 2016. L’artiste est-il un artisan comme les autres ?

L’artiste, un artisan comme les autres ? C’est du moins ce qu’en dit Alain dans le Système des Beaux-Arts, avec une pointe de provocation. Comment réagir à ce genre de texte le jour du baccalauréat ?

Alain 1868-1951
Alain 1868-1951

Alain, Système des Beaux-Arts, livre I, chapitres VI et VII

 » Aucune conception n’est œuvre. Et c’est l’occasion d’avertir tout artiste qu’il perd son temps à chercher parmi les simples possibles quel serait le plus beau ; car aucun possible n’est beau, le réel seul est beau. Faites donc et jugez ensuite. Telle est la première condition en tout art, comme la parenté des mots artiste et artisan le fait bien entendre ; mais une réflexion suivie sur la nature de l’imagination conduit bien plus sûrement à cette importante idée, d’après laquelle toute méditation sans objet réel est nécessairement stérile. Pense ton œuvre, oui certes ; mais on ne pense que ce qui est : fais ton œuvre. Puisqu’il est évident que l’inspiration ne forme rien sans matière, il faut donc à l’artiste, à l’origine des arts et toujours, quelque premier objet ou quelque première contrainte de fait sur quoi il exerce d’abord sa perception, comme l’emplacement et les pierres pour l’architecte, un bloc de marbre pour le sculpteur, un cri pour le musicien, une thèse pour l’orateur, une idée pour l’écrivain, pour tous des coutumes acceptées d’abord. Par quoi se trouve défini l’artiste, tout à fait autrement que d’après la fantaisie. Car tout artiste est percevant et actif, artisan toujours en cela. Plutôt attentif à l’objet qu’à ses propres passions ; on dirait presque passionné contre les passions, j’entends impatient surtout à l’endroit de la rêverie oisive : ce trait est commun aux artistes et les fait passer pour difficiles. Au reste, tant d’œuvres essayées naïvement d’après l’idée ou l’image que l’on croit s’en faire, et manquées à cause de cela, expliquent que l’on juge trop souvent de l’artiste puissant, qui ne parle guère, d’après l’artiste ambitieux et égaré, qui parle au contraire beaucoup. Mais si l’on revient aux principes, on se détournera de penser que quelque objet beau soit jamais créé hors de l’action. Ainsi la méditation de l’artiste serait plutôt observation que rêverie, et encore mieux observation de ce qu’il a fait comme source et règle de ce qu’il va faire. Bref, la loi suprême de l’invention humaine est que l’on n’invente qu’en travaillant. Artisan d’abord. »

Explication par Ligeia Saint-Jean.

Après avoir écouter l’émission, vous pouvez télécharger et étudier la proposition de corrigé.

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Un objet technique peut-il être beau ?


Un objet technique peut-il être beau ? : 1… by projeteee

Cours interactif de philosophie diffusé en visioconférence le 21 janvier 2016 depuis le Canopé de l’académie de Lille dans le cadre du Programme Europe, Éducation, École : www.projet-eee.eu

 

Texte de Gilbert Simondon

« Les objets techniques ne sont pas directement beaux en eux-mêmes, à moins qu’on n’ait recherché un type de présentation répondant à des préoccupations directement esthétiques ; dans ce cas, il y a une véritable distance entre l’objet technique et l’objet esthétique ; tout se passe comme s’il existait en fait deux objets, l’objet esthétique enveloppant et masquant l’objet technique ; c’est ainsi que l’on voit un château d’eau, édifié près d’une ruine féodale, camouflé au moyen de créneaux rajoutés et peints d’une même couleur que la vieille pierre : l’objet technique est contenu dans cette tour menteuse, avec sa cuve en béton, ses pompes, ses tubulures : la supercherie est ridicule, et sentie comme telle au premier coup d’œil ; l’objet technique conserve sa technicité sous l’habit esthétique, d’où un conflit qui donne l’impression du grotesque. Généralement, tout travestissement d’objets techniques en objets esthétiques produit l’impression gênante d’un faux, et paraît un mensonge matérialisé. Mais il existe en certains cas une beauté propre des objets techniques. Cette beauté apparaît quand ces objets sont insérés dans un monde, soit géographique, soit humain : l’impression esthétique est alors relative à l’insertion; elle est comme un geste. La voilure d’un navire n’est pas belle lorsqu’elle est en panne, mais lorsque le vent la gonfle et incline la mâture tout entière, emportant le navire sur la mer ; c’est la voilure dans le vent et sur la mer qui est belle, comme la statue sur le promontoire. Le phare au bord du récif dominant la mer est beau, parce qu’il est inséré en un point clef du monde géographique et humain. »

Gilbert SIMONDON, Du mode d’existence des objets techniques, 1969, Aubier, pp. 184-186.

Dossier pédagogique : http://www.coin-philo.net//eee.15-16.docs/objet_technique_nadrigny_pauline.pdf


Un objet technique peut-il être beau ? : 2… by projeteee

TL. Problématiques sur l’art

Après quelques recherches nous avons tenté d’établir une liste de questions se rapportant à l’art, au jugement de goût et beau, ainsi que des articulations conceptuelles entre la notion d’art et d’autres notions au programme.

Distinction œuvre d’art et objet technique

  • Dimension esthétique dans des objets techniques => design
  • Une maîtrise technique nécessaire dans la création d’œuvres d’art
  • Une œuvre d’art doit être belle / la production technique vise l’utile

Définition de cette valeur esthétique qu’est le beau

  • Qu’est-ce que le beau ?
  • Une œuvre d’art doit-elle être nécessairement belle ?
  • Doit-elle nécessairement procurer du plaisir ?
  • Peut-il y avoir un art du laid ?
  • La notion de sublime

Art et raison

  • La raison est-elle sollicitée dans l’élaboration d’une œuvre ?
  • Est-ce l’irrationnel qui est à l’œuvre ?
  • Peut-on porter un jugement rationnel sur une œuvre d’art ?
  • La distinction entre le goût et la raison (jugement de goût / jugement rationnel) : y a-t-il une part de rationnel dans le goût ?

Religion et art

  • Liens entre et religion et art ?
  • La religion n’est-elle pas à l’origine de l’art ?
  • L’art ne mime-t-il pas un fonctionnement rituel ?

Politique et art

  • L’art doit-il être au service de la politique ? de l’Etat ? du pouvoir en place ? (propagande)
  • L’art a-t-il un pouvoir subversif ?

L’art comme imitation de la nature

  • (Voir la théorie de la mimèsis)
  • Qu’en est-il de l’art abstrait
  • Imitation / représentation
  • Peut-on aller jusqu’à dire que c’est la nature qui imite l’art ?

L’origine de la création artistique chez l’artiste

  • Imitation des œuvres des autres artistes (imitation des maîtres)
  • L’inspiration
  • Le génie

TS. Réflexion sur la notion de culture

Nous abordons la notion de culture. Il s’agit d’une préparation au cours qui aura lieu en amphi prochainement, « L’homme comme un être de culture » et qui correspondra après « L’homme comme sujet », à la deuxième grande partie du cours de philosophie.

Nous avons, durant une heure, causé plutôt librement sur cette notion en suivant la « logique » de la simple juxtaposition d’idées ou méthode de libre-association. Les cartes heuristiques ci-dessous donnent à voir le paysage des idées qui ont été évoquées.

La culture ts1

« Culture » a fait immédiatement penser à la tradition et quelque chose qui se transmet de générations en générations, à ce qui est de l’ordre de l’histoire, une histoire commune dans laquelle on se reconnaît, et, de l’ordre de mode d’existence ou manière de vivre commune. A partir de là, il est apparu plusieurs points importants : la culture concerne l’homme, elle le définit en tant qu’homme ; il existe une pluralité de cultures, ce qui signifie que chaque culture a sa particularité propre ; il existe aussi un sens particulier de culture lorsqu’on parle de « culture générale ».

La culture ts2

La culture concerne l’homme, cela semble une évidence. Encore que le doute puisse être permis lorsqu’on pense à certains animaux comme les dauphins qui apprennent à partir d’expériences, communiquent et transmettent ce qu’ils ont appris. Peut-on alors parler de culture chez l’animal ? Cependant si le doute est permis, l’animal reste un animal de la nature, si l’on entend par là, l’ensemble des instincts et des dispositions naturelles. L’animal est adapté naturellement à son milieu, il est comme programmé pour l’être. La nature est l’ensemble de ce qui est inné, par opposition à la culture qui est l’ensemble de ce qui est acquis, appris. Toute la question est de savoir quelles sont les parts de l’inné et de l’acquis chez l’homme ? Sans nier la part du physiologique, du biologique et du génétique, ce qui fait que l’homme est l’homme et non pas simplement animal provient surtout de la transmission et de la culture. D’où l’importance chez l’homme de l’éducation.

La culture concerne l’homme, elle est sa condition. En effet, d’une part, la nature semble très peu hospitalière à l’homme et d’autre part, ces dispositions naturelles apparaissent bien pauvres pour lui permettre à elles seules de survivre. Sa survie , il la doit au travail, c’est-à-dire à l’effort de transformation de la nature. C’est en cultivant la terre, c’est en développant les techniques de chasse et de pêche qu’il peut se nourrir.

L’homme est un être de culture en tant qu’il est un être de parole et de technique. Le langage apparaissent comme des éléments importants de la culture. Mais il ne faudrait pas oublier, l’art, l’histoire et la religion. On voit par là que l’homme s’inscrit contre la nature. Langage, technique, art, religion sont culturels par excellence, ils sont inventés par l’homme et se transmettent de générations en générations, à travers l’histoire.

La culture ts3

Si l’homme est un être de culture, que la culture est sa propre condition, un point important nous apparu c’est celui de constater que la culture apparaît dans une grande diversité et que chaque culture se singularise d’une autre dans le temps et l’espace. L’histoire révèle cette multiplicité de cultures singulières et aujourd’hui, on peut constater cette diversité.

On reconnaît une culture, sa singularité par sa langue, les croyances, les croyances, les moeurs, les coutumes et habitude. Chaque culture a chaque propre conception du monde.

La culture ts4

Nous avons également évoqué un sens qui apparaît un peu particulier : culture au sens de connaissance, lorsqu’on dit qu’un homme est cultivé ou qu’il a de la culture.

Voilà en ce qui concerne la synthèse de notre réflexion pour l’instant.

Quelques pistes pour aller plus loin.

Si pour l’instant, notre pensée est en chantier, quelques pistes, sans doute parmi d’autres, s’offrent déjà à notre réflexion.

  1. Quelles sont les parts de la nature et de la culture chez l’homme ? Est-il homme par nature ou bien le devient-il par l’éducation ? Comment comprendre le passage de la nature à la culture chez l’homme ? Y a-t-il eu et y a-t-il des hommes naturelles ? L’homme à l’état de nature, est-il un mythe ou une réalité ? Que serait l’homme sans éducation, sans les apports de la culture ?

    Mowgli
    Mowgli, l’enfant sauvage dans la fiction « Le livre de la jungle » de Rudyard Kipling
  2. Si l’homme a dû oeuvrer contre la nature pour des raisons de survie, ne va-t-il pas trop loin aujourd’hui dans son intervention ? L’environnement naturel n’est-il pas menacé par toutes les activités humaines ? L’homme initialement le plus démuni du point de vue dispositions naturelles, en développant sa puissance est devenu le prédateur par excellence ?
  3. La pluralité des cultures n’empêche-t-elle pas la bonne entente entre les hommes ? Ne peut-on pas expliquer un certain nombre de conflits et de guerre par l’incompréhension entre cultures ? Peut-on comparer les différentes cultures entre elles ? A-t-on le droit de juger la culture de l’autre ?
  4. Doit-on confondre un homme cultivé et un homme érudit ?
  5. Une remarque : nous n’avons pas évoqué l’idée de la culture comme ce qui s’oppose à la sauvagerie, à la barbarie ; nous n’avons pas insisté sur l’idée de la culture comme acte civilisateur. Nous n’en étions pas loin lorsque nous nous parlions de transmission et d’éducation. La question est ici de savoir si la culture nous permet d’échapper à la barbarie.

Hegel. D’où vient l’universalité du besoin d’art ?

Hegel
Hegel 1770 – 1831

« L’universalité du besoin d’art ne tient pas à autre chose qu’au fait que l’homme est un être pensant et doué de conscience. En tant que doué de conscience, l’homme doit se placer en face de ce qu’il est, de ce qu’il est d’une façon générale, et en faire un objet pour soi. Les choses de la nature se contentent d’être, elles sont simples, ne sont qu’une fois, mais l’homme, en tant que conscience, se dédouble : il est une fois, mais il est pour lui-même. Il chasse devant lui ce qu’il est ; il se contemple, se représente lui-même. Il faut donc chercher le besoin général qui provoque une œuvre d’art dans la pensée de l’homme, puisque l’œuvre d’art est un moyen à l’aide duquel l’homme extériorise ce qu’il est.

Cette conscience de lui-même, l’homme l’acquiert de deux manières : théoriquement, en prenant conscience de ce qu’il est intérieurement, de tous les mouvements de son âme, de toutes les nuances de ses sentiments, en cherchant à se représenter à lui-même, tel qu’il se découvre par la pensée, et à se reconnaître dans cette représentation qu’il offre à ses propres yeux. Mais l’homme est également engagé dans des rapports pratiques avec le monde extérieur, et de ces rapports naît également le besoin de transformer ce monde, comme lui-même, dans la mesure où il en fait partie, en lui imprimant son cachet personnel. Et il le fait, pour encore se reconnaître lui-même dans la forme des choses, pour jouir de lui-même comme d’une réalité extérieure. On saisit déjà cette tendance dans les premières impulsions de l’enfant : il veut voir des choses dont il soit lui-même l’auteur, et s’il lance des pierres dans l’eau, c’est pour voir ces cercles qui se forment et qui sont son œuvre dans laquelle il retrouve comme un reflet de lui-même. Ceci s’observe dans de multiples occasions et sous les formes les plus diverses, jusqu’à cette sorte de reproduction de soi-même qu’est une œuvre d’art. »

Hegel, Introduction à l’esthétique